Après consultation du Chapitre pro-provincial Europe-Nord, le Prieur général, avec le consentement de son conseil a décidé la fermeture des prieurés de Terrebonne (Canada), Bruxelles (Belgique) et St Jodard (France). Ces décisions ont été difficiles à prendre, car une fermeture est toujours douloureuse pour les frères du prieuré et pour les laïcs qui y sont attachés. C’est en raison d’une « politique d’ensemble de la Congrégation » qu’a été décidée la fermeture de ces lieux qui ont diffusé leur propre rayonnement, grâce à l’engagement et au travail apostolique de nombreux frères. Que le Seigneur les bénisse pour leur labeur fructueux et qu’il soutienne celles et ceux pour qui c’est plus particulièrement difficile.
Plus de 25 ans de présence au Québec
Le 26 juin 1996, les Frères de Saint-Jean étaient accueillis, à la demande de Mgr Charles Valois, dans le diocèse de Saint-Jérôme au Québec. C’est à la paroisse Saint-Pierre, située aux portes des Laurentides, que se fit leur première installation. De 1996 à 2009, cette période a été très florissante et leur présence à Saint-Pierre aura connu un vrai parcours missionnaire. La mise en place des parcours Alpha a préparé la paroisse à vivre le grand Jubilé de l’An 2000 dans un esprit de renouveau. Très vite cette communauté, à la suite du Curé Labelle, est devenue dynamique par des initiatives : préparation des JMJ 2002, Festival jeunesse, Soirées d’adoration, Colloques de philosophie et Camps des familles, etc. Chaque activité rassemblait des gens de tout horizon qui trouvaient plaisir à se retrouver.
Les frères se succédaient, et chacun était toujours accueilli avec beaucoup de chaleur par les Québécois. On reconnaissait, en ce Gang de petits Français, un nouvel élan d’évangélisation. C’était vraiment beau à voir, cette expression de foi qui était partagée par tous les âges, formant une grande famille rayonnante de joie.
En 2009, alors que les frères cherchaient une extension, afin de rejoindre plus de jeunes, qui en raison des universités étaient tournés vers Montréal, Mgr Morissette leur a proposé la paroisse de Terrebonne, qui était éprouvée suite au décès du prêtre en fonction. Une nouvelle mission s’offrait donc aux frères passant d’une petite paroisse à trois paroisses. Celles-ci, étant plus urbaines, à proximité de Montréal, au bord de la Rivière-des-Mille-Îles, cadre magnifique et plus historique. La population était plus importante qu’à Saint-Jérôme. De nouveaux défis s’offraient aux frères ; avec beaucoup d’ardeur, ils se sont donnés pour servir les communautés chrétiennes dans des camps de jours, des camps d’été qui étaient l’occasion d’accueillir des frères et sœurs qui venaient des États-Unis. Les colloques de philosophie ont été des rencontres très appréciées de la part des intervenants…
Le 12 juin 2022, au lendemain de notre dernier colloque de philosophie, étaient rassemblés tous les amis et paroissiens en l’église Saint-Louis-de-France à Terrebonne, pour célébrer les 25 ans de présence des frères de Saint-Jean. Cette rencontre a permis à chacun d’exprimer sa reconnaissance à la communauté qui de son côté a fait part de la fermeture du Prieuré, suite à la décision du Conseil du Prieur général.
La messe était présidée par Mgr Poisson, évêque du diocèse de Saint-Jérôme-Mont-Laurier, assisté de Mgr Morissette, évêque émérite et de frère John-Michael-Paul pro-provincial. La célébration était animée par les différentes chorales de nos trois églises de l’unité Saint-Paul, laissant entendre la ferveur de toute l’assemblée.
Un verre de l’amitié était servi par les Chevaliers de Colomb à la sortie de l’église. L’occasion de se retrouver les uns et les autres dans la joie de souvenirs partagés. Le repas préparé par une équipe de bénévoles, nous a permis de prolonger ce temps de reconnaissance, avec quelques discours et une exhortation de frère John-Michael-Paul sur « Les promesses du Christ dans l’Évangile de Jean » ; jusqu’au magnifique gâteau qui nous était partagé entre les plus de 200 convives. Le tout, se prolongeant avec une période de jeux et de danses, préparés par les sœurs Mater-Dei. Oui, beaucoup de joie, au lieu de la tristesse du deuil en lien à notre départ.
Le Prieuré ferme ses portes le 31 juillet 2022. Le 1er août, la paroisse de Terrebonne accueillera son curé en la personne du père Réjean Trépanier. Les Frères de Saint-Jean quittent le Québec, tout en laissant une trace de leur passage : 52 oblats, 4 prêtres pour le Québec. L’enthousiasme missionnaire des Petits-Gris aura marqué l’esprit des prêtres du diocèse qui leur ont montré beaucoup de bienveillance, toujours très heureux de collaborer avec la communauté. De nombreuses familles resteront marquées par leur intervention auprès de chacune d’elle selon les activités dont elles ont bénéficié auprès des frères. Les frères laissent cette joie de recherche de vérité avec les colloques qui leur ont permis de travailler avec des universitaires en lien avec Gaëlle Fiasse, oblate.
Les Frères de Saint-Jean quittent cette magnifique terre du Québec, où ils ont eu la joie d’annoncer l’Évangile, même s’ils n’ont pas eu l’occasion de voir éclore de leur mission des vocations. Malgré le pouvoir de sécularisation et de laïcisation qui est très fort au Québec, ils ont pu apporter leur témoignage de vie ; nombreux ont été les cœurs touchés par les prédications et la joie des 32 frères qui sont passés ici en Amérique du Nord.
C’est avec tristesse qu’ils quittent cette terre, mais c’est enrichis de leur expérience québécoise qu’ils garderont dans leur cœur, ceux et celles qui durant 26 ans ce sont nourris de l’Évangile et des Sacrements en accueillant le témoignage des Frères Saint-Jean. Rendons grâce à Dieu !
Retour en images sur la présence des Frères de Saint-Jean à Terrebonne depuis 2010
Les Frères de Saint-Jean ont célébré l’Eucharistie : l’action de grâce, à Bruxelles
Le dimanche 26 juin a eu lieu une messe d’action de grâce, présidée par mgr. Jean Kockerols, évêque auxiliaire de Malines-Bruxelles, à l’occasion de la fermeture du prieuré de Bruxelles. Le prieur, frère Jean-Emmanuel et les autres frères du prieuré confient à l’Unité Pastorale l’Olivier et son équipe de laïcs d’accueillir dans leur Unité les paroissiens de l’église Sainte-Marie-Madeleine et leur clocher du quartier de Jette afin d’assurer la suite de la pastorale.
La plupart des frères ont quitté les lieux autour du 5 juillet mais frère Benoît-Étienne assure encore la passation pendant les mois d’été avec toutes les questions pratiques que cela implique.
Frère Ignaz-Maria, frère pro-provincial Europe-Nord, dans un mot adressé aux fidèles pendant cette messe
… si on regarde avec les yeux eucharistiques d’action de grâce, nous pouvons surtout être heureux pour le travail des douze dernières années depuis le départ des pères Rédemptoristes. Nous, les frères, sommes dans l’action de grâce d’avoir pu continuer l’annonce du Christ Rédempteur, d’inviter à le connaître, d’approfondir la foi. Et de l’autre côté nous avons été aussi enrichis par la prière fervente en ce lieu.
J’accompagne le prieuré plus particulièrement depuis 3 ans – et la chose pour laquelle je suis le plus en action de grâce a été le service des frères pendant le Covid. Chers frères, vous avez tout fait pour maintenir la vie liturgique, vous avez célébré la messe en différents endroits dans ce grand bâtiment (à cause du nombre réduit de fidèles qui pouvaient y assister) – le record a été treize messes dominicales je crois. Ainsi vous avez donné le « pain spirituel », le corps du Christ aux fidèles pendant cette période difficile d’isolement.
Merci aussi à vous tous, les fidèles de la Madeleine, qui avez soutenu les frères des différentes manières dans leur mission pendant ces 12 ans. Action de grâce et joie de voir que vous n’êtes pas tombés dans le désespoir et le fatalisme, mais vous vous êtes engagés pour que la vie liturgique à la Madeleine puisse continuer…
Continuons à prier tout spécialement pour les fidèles de la Madeleine ainsi que pour les frères qui s’élancent vers des nouvelles missions.
Retour en images sur la messe d’action de grâce à Bruxelles
Récit de la dernière année à St Jodard ou chronique d’une fermeture
Pour l’Histoire de cette Maison de formation des Frères de Saint-Jean depuis 38 ans, la fermeture de St Jodard aura occupée la Congrégation durant tout l’été 2021, avec l’aide des frères présents sur place ; et qui s’est prolongée sur toute l’année 2022 avec les quelques frères restés sur place.
Durant l’année scolaire 2020-2021, la décision de fermer St Jodard s’est précisée progressivement, mais dès le début il est apparu aux plus lucides qu’elle était éminemment probable. La décision définitive a cependant été prise assez tardivement. C’est dans ce contexte que l’équipe des « Profès Perpétuels » de St Jodard (pratiquement le corps enseignant ou encadrant) a pris la décision de ne rien changer à leurs habitudes et à leurs conversations, afin de laisser les frères étudiants faire et surtout finir une année scolaire « normale », dans une Maison de formation « normale » (et non pas « en fermeture »). C’est ainsi que le plan de fermeture a été préparé de façon privée. Dès la fin des cours, des révisions et des examens, à la mi-juin, tous les frères se sont lancés dans la préparation des ordinations du 26 juin 2021 ; et dans la foulée, ils ont continué sur les travaux de la fermeture de la maison.
Vider une énorme maison
La priorité a été de mettre la bibliothèque en cartons : 15 m3 de cartons des livres les plus importants à transporter en premier (soit environ 7 tonnes), et 18 m3 pour les autres livres (soit environ 9 tonnes)… En effet, le frère bibliothécaire en chef s’apprêtait à partir rejoindre son assignation sur un autre continent et l’entreprise qui devait démonter les étagères allait arriver sous peu car il fallait que les étagères soient remontées à Rimont avant l’arrivée des cartons de livres ! Une fois ce travail fait dans l’urgence, il restait à « ranger » la maison avec les quelques frères qui n’étaient pas partis en apostolat d’été, ou déjà revenus, ou pas encore partis pour de nouvelles assignations. Chaque responsable de charge était invité à vider son bureau, transmettre ses archives, etc.
Les frères étudiants en philosophie partant à Rimont pour la suite de leurs cours, il a fallu, là-bas, leur aménager des salles de cours et pour cela ponctionner sur St Jodard le mobilier nécessaire et pareillement pour leurs cellules. Il en fut de même pour les nouvelles maisons de formation des autres continents qui sont venues récupérer ce qui leur était nécessaire (principalement Kara au Togo).
Comme tous les frères étudiants avaient été formés au secourisme, ils ont même réussi à caser aussi quelques cours sur les nœuds et sur le brancardage. Ces techniques de franchissement d’obstacles se sont révélées très utiles pour le transport et le chargement des meubles ! C’est ainsi que chaque voyage à Rimont a été mis à profit en chargeant le plus possible les véhicules utilitaires avec des meubles et des affaires diverses. St Jodard ressemblait à une ruche, jusqu’au 27 août 2021, où tous les frères encore présents sont partis définitivement pour Rimont avec armes et bagages. Ce fut un long joyeux convoi sur la route.
Définitivement ? Presque ! Ils sont revenus un peu plus tard pour emporter les livres les plus importants, les 15 m3, en faisant une noria avec tous les véhicules disponibles (3,5 T) puis sont revenus de nouveau en janvier 2022 pour donner main forte au chargement des derniers livres de la bibliothèque : les 18 m3 restants, cette fois-ci en utilisant un camion de 18 tonnes !
À partir de la fin août, ils se sont retrouvés en tout petit nombre pour finir de fermer St Jodard : frère André-Daniel, frère Yves de Jésus, frère Vladimir, frère Paul-André et frère François-Marie. Il a fallu s’atteler aux finitions du rangement de la maison. Tant que tout le monde était là, même en petites équipes, le travail avançait et c’était une véritable satisfaction de voir le travail avancer. Il y a eu tout spécialement des bureaux à ranger. Pour le bureau le plus délicat, celui qui contenait le plus d’archives, l’Archiviste de Congrégation est venu prêter main forte à frère François-Marie : à deux, il est plus facile de bien discerner entre ce qui restera pour le successeur et ce qui doit aller aux archives. Et de nouveau, chaque voyage vers Rimont a été mis à profit pour déménager ce qui restait. Il y a eu aussi les dernières factures à payer puis les contrats à résilier.
En parallèle à tout ceci, durant les WE, les frères ont continué d’accompagner le « Groupe des familles de Lyon » dans leur discernement de reprise. Au début, ils venaient à St Jodard seulement pour l’hôtellerie, puis, progressivement, ils se sont intéressés au lieu. Au fil du temps, le groupe s’est étoffé, la réflexion s’est approfondie jusqu’à pouvoir présenter un plan comptable très précis. Cependant, au final, les autorités ne retiendront pas leur projet.
Puis, le froid est arrivé et la température dans l’église ou au réfectoire devenait vraiment basse (en cuisine : plus besoin de frigo !). Alors les frères sont allés se réfugier dans des pièces plus facilement chauffables : l’oratoire de Béthanie à l’hôtellerie pour la messe et les offices et le tout petit réfectoire pour les repas. Quelques radiateurs électriques chauffaient aussi les cellules des plus frileux !
Bref, un passage en mode réduit, au quel les frères n’étaient plus habitués, un peu comme la toute première équipe qui était arrivée à St Jodard au printemps 1983 !
Puis Frère Yves de Jésus est parti en novembre pour rejoindre son nouveau prieuré : Les Jaumes. C’est d’ailleurs pour lui un retour aux sources, c’est de là qu’il est entré dans la Congrégation.
Ce fut un déménagement particulier et en étapes : avec les plantes et des outils de jardin parmi ses affaires personnelles.
En parallèle à tout cela, se poursuivait la réflexion et les procédures pour la fermeture administrative de la maison, notamment vis-à-vis du département de la Loire, le propriétaire car les Frères de Saint-Jean avaient un bail emphytéotique de 99 ans. Bien que tout ceci fut commencé plus d’un an plus tôt, il a encore fallu accompagner de nombreuses visites, soit du département, soit de différents acquéreurs possible et en parallèle, se poursuivait la réflexion sur la formule à choisir. Petit à petit, c’est le choix de trouver un successeur chrétien qui a pris le dessus. Dès lors, il a fallu le chercher, et à cette fin, un très beau film a été réalisé, en voici un extrait.
Cession à l’Institut Alliance Plantatio
C’est ainsi que, le choix étant fait, fin décembre, les frères restants ont vu arriver l’équipe de « Alliance Plantatio ». Ils venaient de quitter Notre-Dame du Chêne qui les avait hébergés durant le premier trimestre de l’année scolaire. Ils ont été hébergés à St Jodard jusqu’à la signature du bail le 15 janvier 2022. C’est un temps qui a été mis à profit pour commencer la transition : transmission des informations sur le fonctionnement de la maison et passation des différents contrats ainsi que le tuilage de certaines factures.
Départs et adieux
De septembre à décembre, les frères ont pu continuer l’activité des Pauses-Mamans et leur faire leurs adieux. Le groupe a pu persévérer en se déplaçant à Montbrison, en se faisant accueillir par les Sœurs Clarisses et accompagner par les pères de la Communauté St Martin. Cependant, cela faisait trop loin pour les Mamans de Lyon qui ont déclaré forfait. Fort heureusement pour elles, l’activité pourra se poursuivre avec un autre groupe, grâce à la nouvelle fondation de Lyon.
Après le départ de frère Yves de Jésus, petit à petit les autres frères ont commencé à prendre leur nouvelle destination. Avec Frère André-Daniel, ils ont profité du voyage de la dernière partie de la bibliothèque pour lui faire faire une visite de Rimont et voir quels pourraient être ses nouveaux quartiers. À la sortie de la Messe, il a pu retrouver de vieilles connaissances et il envisageait son déménagement avec sérénité, voire même avec enthousiasme. Mi février, il partait pour Rimont avec armes et bagages là où lui aussi avait fait ses premiers pas avec la Congrégation.
Le 2 février, frère Paul-André, qui déjà était présent par intermittence, leur a dit au revoir une dernière fois, pour rejoindre définitivement son Prieuré de Corbara.
Le 16 mars, c’était au tour du frère Vladimir de laisser la maison pour rejoindre lui aussi Rimont.
Désormais, les frères perdaient leur cuisinier et il ne restait que les Mamans-Couture pour tenir compagnie à frère François-Marie, trois jours par semaine. Elles furent d’accord pour préparer elles-mêmes de quoi manger, car vu le travail, il ne pouvait pas m’en charger tout seul.
Début mars, les Sœurs Contemplatives sont venues chercher leurs dernières affaires, notamment leur atelier couture grâce au camion prêté par Aymar, un ami fidèle dans les épreuves et dont la maman était Maman-Couture il y a quelques années.
Pour Pâques, frère François-Marie est allé rejoindre les Sœurs de Semur pour vivre un Triduum Pascal en compagnie de la Famille Saint-Jean, et comme il y avait de gros trous dans la présence des frères pour l’aumônerie de Semur en Brionnais pour la célébration quotidienne de la Messe, il y est resté à mi-temps durant un mois et demi. Cela a bien retardé son départ, mais ce fut aussi un agréable moment de ressourcement spirituel et fraternel. À cela se sont aussi ajoutées de nombreuses demandes de confessions et d’accompagnement de dernière minute, mais fin juin, il a réussi à lever le camp définitivement : un premier voyage le jour de la Fête du Sacré-Cœur de Jésus, et un petit dernier voyage le jour de Notre-Dame du Perpétuel Secours. Petit clin d’œil : c’était le nom du petit atelier de sa première charge annuelle quand il est arrivé à St Jodard 37 ans plus tôt ; reçu comme un petit message d’encouragement et de bienveillance venant de Là-Haut.
Ce départ a été précédé de la tournée des aux-revoir auprès de Jean-Pierre Magaud, de la Mairie, des amis du Prieuré, des Mamans-Couture la larme à l’œil et un dernier passage au tout nouveau Musée de la Mairie, dont la maison et son histoire occupent une bonne place avec principalement le résultat des fouilles archéologiques de frère Joseph.